Fiche
Résumé
Le prieuré Saint Cyprien de Bressuire est situé dans un faubourg de la ville de Bressuire, dans le nord du département des Deux Sèvres. L’église est inscrite comme Monument Historique par un arrêté du 9 décembre 1937. Le 7 novembre 1949, elle est acquise par la municipalité soutenue par l’association «les Amis du Vieux Bressuire».
Depuis, elle est désaffectée. Plusieurs campagnes de restauration des maçonneries et des couvertures sont effectuées en 1956 57, 1972 74, puis 2003. En 2008, le cabinet d’architecte Marie Pierre Niguès est finalement chargé de restaurer et aménager l’édifice afin d’y accueillir des activités culturelles. Les travaux entrepris sont à l’origine de plusieurs prescriptions du Service Régional de l’Archéologie : sondages, analyse de bâti et étude historique.
D’après les quelques données historiques parvenues à travers les archives et la documentation, l’église est fondée entre 1021 et 1047 par Geoffroi, vicomte de Thouars. La charte qui relate cet évènement est, en fait, un acte de donation. L’abbaye Saint Cyprien de Poitiers reçoit un bourg avec une église édifiée par Geoffroi lui même. L’édifice est donc déjà construit. Le terme ecclesia qui le désigne est démuni de vocable.
La dédicace serait ainsi imputable à son rattachement à l’abbaye.
Les sources médiévales ne définissent pas explicitement le statut de Saint Cyprien de Bressuire. En 1097 1100, un acte de confirmation des biens et églises de l’abbaye Saint Cyprien de Poitiers est promulgué par Pierre II, évêque de Poitiers. Il désigne l’établissement par les termes ecclesia de Bercorio. L’identification comme prieuré découle de plusieurs mentions de prieurs à partir du XIVe siècle et d’une occurrence de «prioratus de Berchorio» issue d’un acte daté 1391. Ce statut pourrait laisser présupposer la présence d’une communauté religieuse in situ, soumise à la clôture et à l’autorité du prieur. Cependant, aucune source ne précise l’ampleur de cette hypothétique communauté, ni même la présence de bâtiments conventuels.
La documentation n’apporte ensuite guère plus d’indices relatifs à l’évolution des bâtiments. L’acte de 1391 évoqué ci-dessus est un contrat signé par Jeanne de Terves, dame de Blanchecoudre, laquelle donne au prieuré de Saint Cyprien de Bressuire des rentes, terres et dîmes pour la fondation de 2 à 3 messes par semaine à son profit et celui de ses maris et parents. Cette chapellenie est tenue à hommage ainsi qu’en témoignent neuf aveux du «lieu et hébergement de la Mazourie» rendus par les chapelains de la chapellenie de Blanchecoudre entre 1422 et 1656. La fondation est alors identifiée comme la chapelle Saint Blaise desservie « sur l’autel Notre-Dame, en l’église Saint Cyprien ». Les revenus qu’elle procure sont susceptibles d’avoir financé des travaux, mais il n’y a aucun état des lieux avant le 2 juillet 1690. A cette date, « ladite église de Saint Cyprien est en grand danger de tomber par terre et dans une totale ruine ». Elle ne bénéficie a priori d’aucuns travaux durant le XVIIIe siècle. Une source précise que l’édifice est interdit, « le service, les ornements et le modique revenu de la fabrique tout a été transféré à la paroisse de Saint Jean de Bressuire ».
Les différentes études archéologiques de l’église ont mis en évidence huit à neuf phases parmi lesquelles figurent trois constructions, deux destructions et six campagnes d’ornementation avec des enduits peints. Cette mise en phases reste cependant très approximative. En effet, faute d’indices chronologiques fiables, un principe de précaution a conduit à distinguer certaines campagnes d’ornementation des constructions, même s’il est fortement envisageable que quelques unes soient liées.
Les élévations primitives du chevet de l’église consistent en une abside couverte par un cul de four et une travée droite à l’origine voutée en berceau. Ces espaces constituent un chœur dont la séparation avec la nef est marquée par un arc triomphal reposant sur des demi-colonnes engagées. Un enduit avec décor de faux appareil est perçu comme le plus ancien revêtement mural. Les élévations de la nef se résument à quelques portions du gouttereau nord mal identifiées. Elles supporteraient les vestiges d’un premier décor peint, trop ténu pour être décrit. des arrachements d’arcs correspondraient peut être à un décor d’arcades plaquées. La chronologie de cette construction pose problème. L’historiographie s’accorde à l’estimer du XIIe siècle. Elle serait donc largement postérieure à la mention d’ecclesia de la charte de donation datée vers 1030. Se posent alors plusieurs questions. Quelle était la nature des constructions de l’église édifiée par Geoffroi, vicomte de Thouars (phase I) ? La seconde église est elle construite sur le même emplacement (phase II) ? Si une délocalisation a eu lieu, la situation isolée du cimetière résulte t elle de ce transfert ? Le prieuré a t il conservé une relation, voire une proximité avec le bourg ? La construction d’une nouvelle église a t elle provoqué un abandon immédiat de l’édifice primitif ou les deux sanctuaires ont ils coexisté ? En phase III, une importante destruction conduit à l’arasement des maçonneries de la nef. Les causes et la chronologie de cet évènement demeurent ignorées. Une zone de sol fortement rubéfiée repérée dans un sondage témoigne peut être d’un incendie. Le chevet semble en partie épargné, mais la déstabilisation des maçonneries à l’origine de l’effondrement de la voûte de la travée droite est peut être imputable à cet incident.
En phase IVa, la façade occidentale et les murs de la nef sont reconstruits simultanément. Les parements intérieurs sont à nouveau recouverts d’un enduit avec des décors peints. La chronologie relative des différentes scènes restaurées n’est pas évidente à établir.
La construction d’une crypte modifie les dispositions primitives du chœur (phase IVb ?). Le sol est décaissé afin d’insérer la voûte à un niveau de circulation convenable, permettant de conserver les baies originelles du chœur. L’accès à la crypte dépend d’un passage avec quelques marches vers la nef. L’estimation chronologique de cette construction repose uniquement sur les appréciations stylistiques de la pile supportant la voûte. Or, les références sont insuffisantes pour statuer sur une telle question.
Il n’est d’ailleurs pas impossible qu’elle soit antérieure à la phase de destruction de la nef. Un Christ du «Jugement dernier» est peint sur le voûtain axial. Selon Claudine Landry Delcroix, collaboratrice de l’étude, les caractéristiques stylistiques pourraient indiquer une datation entre la fin du XIIIe siècle et le début du XIVe siècle. Pour Brice Moulinier, restaurateur ayant pratiqué des mesures de sauvetage, ce décor semble dater de la fin de la période médiévale. La présence d’une femme, éventuelle donatrice, figurée à gauche de la représentation serait peut être un indice. Le programme peint pourrait correspondre à la fondation de la chapelle par Jeanne de Terves. Les données sont cependant trop insuffisantes pour statuer. Rien n’interdit l’hypothèse d’un ajout de la donatrice et/ou des fleurs ultérieurement et donc en décalage avec le style du Christ. La superposition de ce dernier avec un enfant Jésus témoigne de notre incapacité à faire la part des surpeints.
La présence de quelques motifs de fleurs dans le registre 6 autoriserait à supposer une campagne d’ornementation du chœur contemporaine de celles de la crypte et du martyr du Saint dans la nef. Cependant, ces éléments n’offrent guère plus d’indices chronologiques.
Le décor du chœur est ensuite, partiellement occulté par un badigeon clair destiné à recevoir des motifs ornementaux exécutés au pochoir. Il s’agit de motifs végétaux et d’étoiles jaunes disposés en diagonales. Le procédé est relativement courant au XVe siècle, mais aucune comparaison ne permet d’affiner la chronologie.
Un évêque est également peint. des particularités de son costume liturgique, notamment la mitre haute aux bords incurvés inciteraient à l’attribuer à la fin du XVe siècle.
L’absence de motifs au pochoir sur ce décor annihile les perspectives de chronologie relative.
Une nouvelle scène figurée recouvre les motifs au pochoir. Elle représente un Saint couronné tenant peut être le fléau d’une balance. Les procédés techniques et caractéristiques stylistiques semblent dissocier l’artiste de celui ayant réalisé l’évêque, mais ici encore, les critères stylistiques ne favorisent pas une estimation chronologique.
L’édifice est finalement transformé en étable. Tous les espaces sont divisés par un plancher de manière à aménager un fenil à l’étage.
Patrick BOUVART