Fiche
Résumé
Si dans les années 1990 un cyclone découvre déjà quelques vestiges, ce n’est qu’en 2004 que le cimetière localisé sur le rivage de la plage de L’Autre Bord est clairement identifié. En effet, la mise au jour d’ossements humains suite à une forte houle motive une opération archéologique, conduite par T. Yvon (SRA-DAC Guadeloupe). Affleurant à la surface de l’actuelle plage, deux inhumations en cercueil de bois cloué sont alors découvertes.
En 2010, les gendarmes alertent la directrice du musée Edgar Clerc du Moule de la découverte de squelettes à l’extrémité ouest de la plage par un promeneur. L’intervention menée sous la responsabilité de A.-M. Fourteau (SRA-DAC Guadeloupe) permet, malgré une mer agitée, de reconnaitre trois inhumations en cercueil de bois cloué, orientées nord – sud (tête au nord) et creusées dans un niveau limoneux brun. Un sondage, réalisé à moins d’un mètre au sud de ces sépultures, atteste l’existence d’autres tombes, creusées dans ce même niveau limoneux, à une vingtaine de centimètres sous le niveau de sol actuel de la plage.
Dans les années 1970, une dune de plus de 2 mètres de haut couverte de végétation, et située quelques mètres en arrière du rivage, protège encore la côte. Depuis, en raison des aménagements côtiers et de l’exploitation du sable, sa disparition progressive a accéléré les processus d’érosion marine et éolienne, bouleversant ainsi la topographie locale. Le cimetière d’époque moderne, implanté sur la plage de l’Autre Bord et attenant au bourg primitif de Portland, souffre ainsi depuis plusieurs années des processus d’érosion qui mettent au jour de nombreux ossements humains mêlés à des clous de cercueil en fer.
La disparition progressive de sépultures identifiées à proximité du rivage a donc motivé la prescription d’une fouille archéologique de sauvetage. Cette intervention avait pour objectif d’évaluer l’extension et la densité de la zone sépulcrale, ainsi que de fouiller les sépultures directement menacées. Cette opération devait permettre de juger de l’état de conservation des vestiges, de caractériser les modes d’inhumations et d’identifier la population inhumée.
Deux zones, localisées dans la partie ouest de la plage de l’Autre Bord, ont été explorées dans le courant de la fin de l’année 2012.
Sur la pointe ouest de la plage (zone 1), 4 fosses et 12 inhumations en cercueil de bois cloué ont été mises au jour. Le niveau d’apparition des vestiges est homogène et se situe entre 0,30 et 0,55 m IGN 1988.
Les creusements sépulcraux suivent des axes variables. La sépulture 2 est orientée nord-sud, les sépultures 4 et 6 sont orientées axe ouest-est, et les 10 dernières (1, 3, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 13 et 14) suivent un axe globalement nord-est – sud-ouest.
Étant donné la rapide montée du niveau d’eau dans les tranchées, l’orientation du corps n’a pu être appréhendée que pour quatre inhumations. Le sujet de la sépulture 4, un enfant d’âge compris entre 1 et 4 ans, est inhumé sur le dos selon un axe est-ouest, la tête à l’est (fig. 1). Les individus des sépultures 5, 6 et 10 sont tous de taille adulte (grands adolescents ou adultes) et ont tous été déposés sur le dos, selon un axe ouest-est (SEP 6) ou sud-ouest – nord-est (SEP 5; SEP 10), la tête à l’ouest.
Aucun recoupement n’a été repéré au sein de cet espace sépulcral pour lequel la densité d’occupation est relativement peu importante. En effet, 12 sépultures ont été mises au jour sur une surface de 138 m². Si l’on estime le nombre d’inhumations pour cette pointe, dont la superficie totale est d’environ 500 m², l’effectif est alors porté à un peu plus d’une quarantaine de tombes.
À l’est de la résidence (zone 2), bien que des sépultures aient été identifiées récemment en bordure de mer, aucun élément funéraire en position primaire n’a été mis au jour lors de notre intervention. Toutefois, un vaste niveau anthropisé, constitué de restes osseux humains et fauniques et de clous en métal en position secondaire, présuppose l’existence ancienne d’une aire funéraire.
D’après l’ensemble des données recueillies, pour ce secteur de la plage, il est très probable que les sépultures conservées se localisent à proximité immédiate du rivage, dans une zone se situant entre la ligne de montée des eaux et la bordure nord de nos tranchées.
Des restes osseux humains ont d’ailleurs été repérés près du rivage, en dehors des limites de la zone prescrite, sur quelques dizaines de mètres en direction de l’est. Ce constat suggère que l’aire funéraire considérée peut s’étendre encore dans cette direction sans qu’il soit possible, à l’heure actuelle, d’en juger l’état de conservation.
L’opération conduite sur la plage de L’Autre Bord en décembre 2012 confirme bien l’existence d’un cimetière d’époque moderne, d’une faible densité, encore relativement bien préservé à l’ouest malgré les processus naturels d’érosion. Les données archéo-anthropologiques sont malheureusement insuffisantes pour préciser l’attribution chronologique de ce cimetière, et sa population ne saurait en aucun cas être caractérisée.
Coralie DEMANGEOT