HADÈS Archéologie

Labignasse

Fiche

Résumé

La ville de Narrosse, distante de 4 km de Dax, s’inscrit dans le périmètre urbain de cette dernière. Elle s’étend sur la terrasse sud de la vallée de l’Adour, entre les communes de Candresse, Yzosse et Saint-Pandelon. Cette opération a été motivée par le projet du Conseil Général des Landes d’aménager un contournement routier à l’est de l’agglomération dacquoise. À cette occasion, des diagnostics archéologiques ont été réalisés et ont mis en évidence, sur la parcelle cadastrale AZ 26, au lieu-dit Labignasse, des vestiges du Moyen Âge.

Ces derniers composent un ensemble structuré fait de trous de poteaux, de fosses-silos et de fossés. Le site est compris dans un environnement rural et agricole, encadré au nord par la route de l’Observatoire et au sud par la voie ferrée Dax/Tarbes. Son positionnement en bordure de plateau interfluve, occupe un point topographique remarquable, dominant d’une vingtaine de mètres la rive droite de la vallée du Luy de France.

En ce qui concerne le Paléolithique, plusieurs vestiges d’industrie lithique ont été reconnus, notamment sur le site d’habitat de Tisson attribuable au Magdalénien final. Pour les périodes protohistoriques et antiques, des indices d’occupation étaient connus, s’ajoutant à l’important site du Castra d’Arles, qui se développe à moins de 300 m de la zone fouillée lors de la présente opération. Les données pour la période médiévale sont quant à elles particulièrement lacunaires. L’intérêt scientifique suscité par ces indices et sites a motivé la publication d’une prescription par le SRA. Cette dernière concerne une superficie de 3900 m2.

Malgré un état d’arasement conséquent et une densité réduite de mobilier, la fouille a permis la mise au jour partielle d’une aire de débitage de silex du Paléolithique supérieur. Par ailleurs, ont été mises en évidence 523 structures fossoyées datant de manière homogène du haut Moyen Âge.

Les 277 pièces lithiques recueillies proviennent certainement d’un ou deux blocs. Les caractéristiques du silex et notamment le cortège de fossiles visibles laissent supposer un approvisionnement depuis l’anticlinal de Tercis, distant de 7 km. Le mobilier se compose majoritairement de grands éclats d’épannelage. En l’état, la chaîne opératoire est incomplète. Les pièces illustrent avant tout la préparation et l’entretien des blocs. Le plein débitage ne figure qu’à titre anecdotique avec quelques lames et lamelles (fig. 1). Parmi les pièces retouchées, l’outillage est restreint. On dénombre seulement sept outils, tel qu’un bec de type zinken et un perçoir. Ces données permettent de proposer avec prudence une attribution au Paléolithique supérieur. Il s’agit d’un amas homogène correspondant à une occupation semble-t-il unique. Il paraît très probable que l’intégralité du gisement soit conservée sous les colluvions agricoles.

Les entités médiévales repérées se répartissent uniformément au sein de l’emprise. On note toutefois une densité plus importante à l’approche du versant et un maillage plus lâche à l’extrémité orientale. Au sud-ouest, les aménagements sont encadrés par trois fossés successifs implantés parallèlement aux courbes de niveau. Le dernier d’entre eux se compose de trois sections ayant pour fonction de délimiter et drainer les eaux provenant d’une zone bâtie sur laquelle se succèdent quatre édifices. La mise en œuvre de ce bâtiment fait appel à trois creusements parallèles de 12 m de long, interprétés comme des tranchées destinées à recevoir des sablières basses ou des murs en matériaux périssables (fig. 2). Son plan rectangulaire, d’orientation est-ouest, est complété par une annexe aux angles arrondis, portant la superficie à 78 m2. Lui succède un bâtiment d’une centaine de mètres carrés au mode d’édification similaire si l’on excepte un plan au sol inversé. Cet ensemble paraît avoir fait l’objet d’une reconstruction au moment de l’édification des bâtiments sur poteaux 10 et 11. En ce qui les concerne, un plan rectangulaire de 5 m x 4 m a été adopté. Les datations issues des analyses radiocarbone plaident en faveur d’une mise en place dans le courant du IXe siècle avec un terminus ante quem deux siècles plus tard. Nous proposons d’identifier ces bâtiments comme des granges.

Le nord-est de l’emprise est occupé par de petites entités, construites selon un plan rectangulaire régulièrement repris, puisque les 12 bâtiments mesurent autour de 2,50 x 2 m, soit une superficie de 5 m2 (fig. 3, 4, 5). La plupart se composent de quatre poteaux corniers, mais quelques-uns incluent un cinquième élément porteur. La morphologie de ces édifices permet de proposer une identification comme des greniers sur poteaux destinés au stockage des denrées agricoles. Les éléments de chronologie permettent de placer ces aménagements entre le VIIIe et le IXe siècles. Ces structures de stockage sont associées à une centaine de silos et de fosses-silos qui se répartissent par petits groupes à proximité. En dépit d’un corpus carpologique succinct, l’analyse a pu démontrer que l’économie végétale est essentiellement centrée sur le duo seigle/millets. En cela, il conforte et s’inscrit dans la norme des productions médiévales. On constate néanmoins une diversification relative au travers des fruits cultivés, cueillis, des cultures jardinées et des céréales secondaires.

Plusieurs indices, dont notamment la morphologie des pièces et leur spatialisation, soutiennent l’idée d’une relative contemporanéité des productions de cet ensemble agricole carolingien au cours d’une occupation resserrée dans le temps.

Benoît GARROS