Fiche
Résumé
Entre 1980 et 1984, J. Caillau a mené des fouilles archéologiques au lieu dit La Basse Garde identifié comme le site de l’ancien « Château Morand ». Les ruines reconnues par l’archéologue occupent un promontoire dominant la rive droite de la petite vallée de la Glane. Un vaste bâtiment quadrangulaire s’élève sur le replat sommital. Il domine, au sud, un plateau délimité par un mur de clôture. Ces premières campagnes archéologiques ont permis de récolter un mobilier conséquent (céramique et métal) s’échelonnant sur deux siècles : entre le XIIe et le XIVe siècle. Cette dimension chronologique proposée par J. Caillau corrobore, selon ses dires, plusieurs sources ecclésiastiques. Ainsi, dans le registre O Domina , trois textes, mis en évidence par Bernadette Barrière et pouvant être datés du XIIIe siècle témoigneraient de l’existence du Château Morand.
L’importance des vestiges archéologiques de «Château Morand» semblent donc correspondre à une réalité historique. Mais l’étude menée dans les années 80 fut limitée à quelques sondages et n’a pu répondre à toutes les questions posées. La campagne réalisée en septembre 2006, se présente comme une étude complémentaire. Trois sondages en tranchées devaient répondre à des questionnements bien précis :
• Actualiser nos connaissances sur l’environnement du site : topographie, secteur d’occupation, agencement de l’espace…
• Actualiser les données anciennes sur le bâti (mode de construction) et la nature du tertre : site artificiel (motte), site naturel aménagé (tour emmottée : apport de sédiments, mise en terrasse, affleurement rocheux décaissé etc..).
• Repérer et qualifier les éventuels éléments de défense (clôture du plateau sud, fossés…).
• Actualiser la chronologie relative et absolue de l’occupation.
Au bilan, l’ensemble de la problématique de départ a été traitée, mais plusieurs questions restent soulevées et plusieurs réponses restent encore empreintes d’incertitudes. Sur la nature et l’aménagement de l’éperon de Château Morand, l’exploration en tranchées a permis d’établir avec certitude que le relief naturel a subi, sur le versant nord, un important remodelage avec l’apport de puissants remblais constitués avec des matériaux concassés et damés. La plateforme sommitale recevant le noyau bâti actuel a été également aplanie par décaissement du pointement rocheux naturel. Puis elle a été rehaussée et nivelée, au sud, grâce à un apport de matériaux fournis en partie par les déchets de taille provenant du remodelage de la plate forme. L’édification du bâtiment sommital entraîne le percement de ces remblais au sud afin de s’ancrer dans le substrat rocheux. Château Morand est donc identifié à un aménagement artificiel dans la mesure où le profil naturel du promontoire rocheux a été remodelé.
Concernant les structures défensives, un fossé ceinture vraisemblablement la plateforme et sépare le noyau bâti sommital du plateau. Il est excavé dans le substrat sans qu’il soit possible de déterminer s’il est contemporain ou non du bâtiment sommital. La seule certitude étant que l’abandon des fossés précède la destruction de l’édifice. Sur l’occupation du plateau sud, les données sont rares en raison notamment de la faible dynamique de sédimentation. Le substrat rocheux affleure sur une grande partie du périmètre interne du plateau. Néanmoins, plusieurs indices révèlent une possible occupation du terrain : des traces régulières de décaissement du sol, des éléments de maçonnerie arasée. de plus, la mise en évidence d’une maçonnerie antérieure aux remblais d’exhaussement de la plateforme sommitale va également dans le sens de l’existence d’un noyau bâti primitif sur le plateau. La question des dimensions chronologiques de l’occupation reste empreinte d’incertitudes. Sur la base des divers éléments permettant d’aborder la chronologie– mobilier céramique, éléments et mise en œuvre des maçonneries, chronologie relative avec les structures d’aménagement et de fortification (enceinte fossoyée) – la période d’occupation du site médiéval de l’éperon de Château Morand semble s’échelonner entre le XIe et le courant du XVe siècle. D’après les relations stratigraphiques entre les divers éléments mis en évidence par la fouille, la chronologie relative phasée pourrait se présenter comme suit, tout en ne constituant qu’une hypothèse et une amorce de réflexion :
• Une première phase d’occupation du site avant aménagement du tertre se distingue par un ensemble d’indices : aménagements en creux, maçonneries.
• La seconde phase, celle de l’aménagement de la plateforme sommitale, serait à placer entre le XIe et le XIVe siècle. Elle est également illustrée, d’une part par le creusement de l’enceinte et d’autre part par la construction de l’édifice sommital qui perce les remblais de rehaussement de la plateforme. Ces deux actions interviennent probablement dans le même intervalle. C’est également dans ce dernier qu’il faut placer les phases d’occupation du bâtiment. Les éléments céramiques exhumés à l’intérieur par J. Caillau sont attribuables à un horizon des XIIe et XVe siècles.
• La troisième phase de l’occupation se traduit par l’abandon et le comblement des fossés, dont au moins celui du fossé sud apparaît volontaire. L’occupation du bâtiment sommital, ou du moins son intégrité structurelle, semble se maintenir quelques temps après la condamnation des fossés.
• La dernière phase de l’occupation correspond à l’abandon définitif de l’éperon et à la destruction de l’édifice qu’il est difficile de dater précisément mais qui pourrait intervenir autour de la fin du XVe siècle.
Jérôme HÉNIQUE