HADÈS Archéologie

Abbaye de Sorèze

Fiche

Résumé

 2009, ancienne abbatiale

Le réaménagement de l’ancienne église abbatiale de Sorèze en auditorium a fourni l’occasion d’explorer pour la première fois le sous-sol de l’abbaye. Cette exploration s’est déroulée dans le cadre de deux opérations archéologiques distinctes. La première d’entre elles, menée par P. Stéphant, a consisté à fouiller l’emprise de la fosse technique initialement prévue sous l’emplacement de la future scène, en partie est de la nef. Mais l’ampleur des vestiges conservés a conduit le ministère de la Culture (SRA) à demander une modification du projet d’aménagement. Dans un second temps et sous la direction de J. Ollivier, un suivi archéologique a été effectué sur l’ensemble de la nef et du collatéral, où des terrassements préliminaires aux travaux devaient être pratiqués. Par ailleurs, en partie ouest, le creusement de tranchées destinées à accueillir des longrines soutenant les gradins a également été suivi par des archéologues (fig. 1).

L’ensemble de ces opérations est riche d’enseignements, même si elles ont fourni une documentation inégale et déséquilibrée en raison des conditions d’intervention. Tout d’abord parce que la fouille n’a pas pu être menée à son terme, ensuite parce que les données issues des suivis de travaux sont pauvres en indices stratigraphiques. Ces opérations confirment en tout état de cause la richesse du patrimoine archéologique de l’abbaye école, trop longtemps délaissé.

Les vestiges les plus anciens à avoir été identifiés sont assez difficiles à interpréter en raison de leur isolement. Ils se résument à un mur orienté nord sud et à une portion de maçonnerie reprise dans une construction postérieure. La deuxième phase est nettement plus intéressante car il s’agit probablement de l’église abbatiale médiévale. En effet, un mur a été suivi sur plus de 26 m d’est en ouest et un autre perpendiculairement côté ouest. Ces deux constructions correspondent probablement au mur gouttereau nord et à la façade ouest d’un premier édifice de culte.

Divers aménagements témoignent ensuite de l’évolution du bâtiment dans le respect du cadre architectural initié par la construction de ces murs. Au sud du mur gouttereau, un radier de sol a été dégagé tandis qu’au nord, un pavement de carreaux de terre cuite a été mis au jour sur une longueur de 9 m environ (fig. 2). Il atteste l’existence d’un important édifice adossé au nord.

Une nouvelle étape est marquée par l’arasement des constructions et par la mise en place d’une série de puissantes maçonneries le long de l’ancien mur gouttereau nord et en appui sur ce dernier (fig. 3). La mise en œuvre de ces massifs trouve un troublant écho dans un texte daté de 1513, un bail à bâtir qui décrit les travaux à venir dans l’église abbatiale. Il y est notamment question de la destruction de l’ancien édifice et de l’édification de contreforts destinés à supporter une charpente voûtée. Les nombreuses concordances entre ce texte et les vestiges découverts nous incitent à rattacher cette phase au début du XVIe siècle et à interpréter les maçonneries régulièrement espacées comme des contreforts, qui délimitent sans doute au nord-est deux chapelles, dont l’existence est également connue par les textes. Le plan ainsi reconstitué est assez typique de l’architecture gothique méridionale.

De nouveaux espaces ont ainsi été créés mais ceux-ci n’ont pu être clairement appréhendés que dans la zone de la fouille, à l’est de la nef. Des inhumations ont été découvertes dans les chapelles comme à l’extérieur de celles-ci.

Les dernières phases du site sont représentées par diverses maçonneries délicates à interpréter. Par contre, l’analyse du bâti a permis de mettre en évidence les différentes étapes qui ont suivi la reconstruction mauriste de l’abbaye à la fin du XVIIe siècle. L’abbatiale a ainsi été plusieurs fois remaniée, notamment en partie nord où des chapelles ont été adossées à la nef au cours du XIXe siècle. Dans les années 1860, l’abbatiale cesse d’être un lieu de culte ; elle est transformée en manège à chevaux et les chapelles deviennent des écuries.

Julien OLLIVIER, Pierrick STÉPHANT

2009, ancien gymnase

La fouille de l’ancien gymnase de l’abbaye école de Sorèze a été motivée par la construction d’une piscine dans le cadre du réaménagement des locaux en complexe d’agrément (hammam, spa) pour les clients de l’Hôtel Abbaye École. Comme les potentialités archéologiques du secteur sont en grande partie méconnues, l’Architecte en Chef des Monuments Historiques a demandé la réalisation d’un premier sondage d’étude, sous le contrôle du Service Régional de l’Archéologie de Midi-Pyrénées. Suite aux découvertes alors effectuées, la zone de fouille a été étendue à l’ensemble de l’emprise de la piscine projetée (environ 60 m²) (fig. 4).

Les vestiges mis au jour se décomposent en quatre phases, bien souvent mal datées faute de mobilier significatif.

La première phase ne comprend qu’un mur très mal conservé, totalement isolé et à peine dégagé. En effet, la cote de fond de fouille fixée par rapport à l’impact du projet correspond à son niveau d’arasement.

Dans un deuxième temps, un grand mur d’orientation est-ouest est construit sensiblement au centre de l’emprise. Bâti au moyen de moellons calcaires et surtout de galets liés au mortier, il a pu être observé sur presque dix assises. Un sondage un peu plus profond a permis de déterminer que ce mur est associé à un sol en galets (fig. 5). Par ailleurs, il sert d’appui à un mur construit de manière identique en partie sud-est ainsi qu’à une construction d’angle en abside côté nord-ouest qui, pour sa part, montre des techniques de mise en œuvre différentes. Le premier mur est percé d’une porte, au même titre que le mur est-ouest contre lequel il est bâti. Ces deux baies sont bouchées par la suite, avant la ruine complète de l’édifice, matérialisée notamment par des effondrements de toiture. C’est cet épisode qui est le mieux daté puisque le mobilier découvert permet de le situer entre le XIIIe et le XVe siècle.

À l’est de ces constructions, un mur nord-sud est ensuite édifié. Il est constitué d’éléments posés à sec mais tous les niveaux associés à cette phase ont disparu. Ce mur est donc isolé et absolument impossible à interpréter en l’état.

Les dernières maçonneries repérées sur le site correspondent vraisemblablement au premier état de l’édifice actuel. En effet, un long mur situé le long de la limite nord de la pièce a été mis au jour par sections. Trois constructions orientées nord-sud ainsi qu’un massif d’angle en abside lui sont adossés. Deux voire trois canalisations sont associées à cette phase.

Cette fouille s’inscrit dans une série d’opérations menées depuis 2008. D’abord conduites dans l’abbatiale, elles permettent d’enrichir nos connaissances sur un lieu dont l’histoire remonte au moins à l’époque carolingienne. Elles soulignent également l’importance du suivi archéologique dans l’enceinte de l’ancienne abbaye école, qui fait aujourd’hui l’objet de nombreux travaux liés aux nouvelles activités qui y sont pratiquées (hôtels, salle de spectacle).

Julien OLLIVIER