HADÈS Archéologie

Dominium Providence

Fiche

Résumé

Fouillé durant l’été 2005, le site est localisé à l’intérieur de l’agglomération médiévale, à quelques mètres seulement de la courtine nord de l’enceinte du XIIIe s. Il a livré les vestiges d’un bâtiment entièrement construit en terre crue et occupé sans interruption depuis la fin du XIIe s. jusqu’à nos jours. Les niveaux les plus récents ont presque tous disparu mais les séquences médiévales, stratifiées sur plus d’un mètre, ont bénéficié d’une préservation exceptionnelle en contexte urbain.

Initialement composé de deux pièces résidentielles disposées en enfilade le long d’une rue, l’édifice est doté au nord d’une troisième salle dès le début du XIIIe s., suite aux travaux d’édilité qui accompagnent la construction de la nouvelle muraille et réorganisent le parcellaire urbain. Dès lors, le bâtiment se spécialise dans l’artisanat des matières animales, comme l’attestent les nombreux aménagements découverts : une batterie de trois cuves réalisées avec des tonneaux de bois remplis de cendres et de chaux (pelains), un puits, de nombreux foyers aménagés à même les sols. La présence de ces installations spécifiques, d’un outillage métallique très particulier – tenailles, crochets pour la récupération des peaux mises à tremper – et de restes osseux de caprins, permet d’identifier une activité de tannerie qui illustre la vocation artisanale du quartier dépeinte dans les sources médiévales.
Par ailleurs, le croisement de plusieurs études spécialisées, sur les textes, les os animaux, la culture matérielle, l’examen microscopique des sédiments stratifiés, a permis de distinguer un second artisanat, qui supplante définitivement le premier dans le courant du XIIIe s. : la fonte des graisses animales pour produire le suif.
En devenant le Légassieu (« fondeur de suif »), lieu officiel où toutes les graisses de la ville seront fondues jusqu’à la Révolution, l’atelier se dote de nouvelles installations – four, bassins maçonnés – et acquiert un statut si particulier qu’il donnera son nom au quartier qui l’abrite.

Cette fouille a permis de documenter de manière exceptionnelle des thèmes divers et encore peu connus, tels que l’architecture vernaculaire en terre crue massive et l’artisanat des matières animales. Enfin, ces résultats enrichissent notre connaissance de la morphologie urbaine de Montpellier, éclairant d’un jour nouveau la chronologie et le processus par lequel cet ancien faubourg est devenu un quartier intra-muros.

Yann HENRY