Fiche
Résumé
Le manoir de Chant d’Oiseau est situé dans la plaine du Loudunais, en limite des communes de Trois-Moutiers et Bournand. L’édifice est inscrit sur la liste de l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques depuis le 6 février 1929. En 2008, le propriétaire a entrepris un programme de restauration et de mise en valeur. Dans ce cadre, une reconnaissance archéologique du tracé d’une enceinte renfermant une cour au nord a été sollicitée auprès du Service Régional de l’Archéologie. La prestation consistait en une série de 4 sondages implantés sur des limites parcellaires et des bâtiments disparus, mais figurés sur le cadastre du XIXe siècle.
Selon l’historiographie, le plus ancien seigneur de Chant d’Oiseau, Emar Odart, est mentionné en 1253 dans un texte relatif à une donation d’Alphonse, comte de Poitiers. Ses successeurs sont Pierre Odart (1285), Aimar II (1319), Guion (1405), Jean (1459). La fille de ce dernier se marie à un membre de la famille de Corguilleray et lui apporte le fief. Ils ont pour héritier Thomas de Corguilleray (1469). Chant d’oiseau devient ensuite la propriété de Philippe de Savigny (1518), Charles de Telligny (1565), Gislebert Chasteigner (1569), Renée le Proust, veuve de Jacques de Sainte-Marthe (1591), Louis de Sainte-Marthe (mort en 1640), François, et finalement Claude de Sainte-Marthe. Aucune source n’évoque de saisie, ni de vente comme bien national. Les propriétaires demeurent méconnus aux XIXe et début du XXe siècle. En 1892, Jules Robuchon indique simplement qu’il s’agit d’une ferme.
Le manoir est implanté sur la rive droite d’un petit ruisseau appelé le Martiel. Le plan cadastral du XIXe siècle offre un aperçu du parcellaire différent de celui actuel. Les constructions étaient autrefois réparties autour de deux cours distinctes correspondant aux parcelles 554 et 558. Ces dernières étaient circonscrites par des murs de clôture aujourd’hui totalement arasés. Dans la parcelle 554, le plan de masse circulaire correspond à un pigeonnier. Sa chronologie demeure méconnue. Les autres constructions sont des dépendances agricoles. Elles ont fait l’objet de transformations récentes. L’état actuel ne permet plus d’estimer leur chronologie initiale. Dans la parcelle 558, seul subsiste le corps de logis. Les deux autres édifices ont totalement disparu. Celui localisé au nord est figurait encore sur le cadastre du XXe siècle. Sa démolition est donc récente. Le logis est un quadrilatère mesurant 28,30 m de long et 9,23 m de large hors œuvre. Les élévations constituent deux étages dont un sous comble. La façade principale est celle exposée au nord-est. Elle est ajourée de larges baies à croisée et flanquée au tiers de sa longueur par une tour d’escalier hors œuvre. La porte d’entrée est ornée d’un motif en accolade surmonté de feuilles de choux et d’un fleuron central. L’angle sud du corps de logis est flanqué d’une tour circulaire dont le diamètre avoisine 5,85 m. L’élévation de celle-ci est conservée sur une hauteur proche de 13 m et comporte 3 étages. des arrachements de maçonnerie sur l’élévation nord-est de cette tour témoignent de la disparition de structures appuyées contre le pignon sud-ouest. L’ensemble architectural présente en apparence une grande homogénéité. La typologie des ouvertures et des cheminées et la nature des éléments décoratifs indiqueraient une construction de la fin du XVe siècle. Toutefois, l’observation de quelques parements intérieurs a révélé une grande quantité de remplois. En outre, une maçonnerie apparaissant en soubassement de la tour suggère une construction antérieure. Ces remarques impliquent d’ores et déjà un minimum de trois phases, mais faute d’une véritable analyse de bâti, aucun indice ne permet d’identifier la chronologie et la nature de la construction primitive (phase I). de même, la chronologie, les raisons et l’ampleur de la destruction (phase II) demeurent méconnues. La datation et la nature exacte des reconstructions (phase III) ne sont appréhendées que de manière approximative. Enfin, des aménagements postérieurs ne sont pas totalement exclus. L’étude de l’enceinte s’appuie donc sur des contextes historiques et archéologiques encore très mal définis. Les plans cadastraux révèlent en outre d’autres aménagements disparus. Le parcellaire du XIXe siècle était profondément marqué par la présence de fossés. Le caractère artificiel de ces derniers ne laisse aucun doute.
Les sondages ont révélé différentes portions d’un mur d’enceinte. Les élévations sont conservées sur 70 cm de hauteur maximum. Elles mesurent 60 cm d’épaisseur. À l’est, ces constructions succèderaient au creusement d’un fossé d’environ 6 m de large et 1,20 m de profondeur. Ce dernier était inondé par une eau stagnante. Son comblement est en majeure partie attribuable au XIXe siècle. L’ensemble du dispositif de clôture de la cour favorise l’hypothèse d’une campagne de fortification. La chronologie demeure cependant indéterminée.
Une étude historique précise fait réellement défaut pour aborder les vestiges de ce site. de même, des recherches archéologiques complémentaires s’avèrent indispensables afin de découvrir le dispositif d’entrée de l’enceinte (châtelet ou simple portail ?) et d’éventuelles tours de flanquement.
Patrick BOUVART